—
Les deux premiers titres de la collection :
– L’Histoire naturelle de Pline l’Ancien, édition bilingue intégrale, traduction de Littré, deux volumes reliés sous coffret, 2150 p.
– Mes Écarts ou Ma tête en liberté, texte intégral des pensées publiées par le Prince de Ligne, un volume relié, 370 p.
—
« L’industrie de la culture est née d’avoir adopté pour unique physique, et contre l’imperturbable intemporalité des œuvres, la dynamique mondiale des cadres du tertiaire. Cette industrie du « culturel » a immanquablement créé une industrie du « classique », imposant l’environnement vicié et la zone de sinistre confort au sein desquels, parmi l’habitude de mettre en valeur quelques œuvres, a surtout jailli le réflexe d’oublier la quasi-totalité des autres. Par un global embourgeoisement de librairie l’on tait ainsi une surabondance tout en faisant croire que l’on s’en soucie. Tandis que le monde des livres est devenu pour soi-même non seulement une fin sans finalité mais un énorme surmoi se travaillant à jeter un voile d’étouffante obésité sur l’évidence des grandeurs, il s’agit de faire sortir de ce cercle, à quoi condamne l’incurie de cet artificieux inconscient, tant d’œuvres qui continuent certes leur vie dans le silence, parallèlement au monde des agités, mais dont empêche de jouir cette hypnose culturellement affairée. Les Classiques favoris sont précisément là pour ruiner maints silences inconvenants à coups d’éternité tapageuse.
Dans l’univers si étriqué du « tout-culturel », Les Classiques favoris ont pour ambition l’extraordinaire simplicité de donner à lire ce dont nous avons eu sous les yeux l’autorité géniale sans que nous soit cependant donnée la possibilité de la regarder : ils font découvrir aussi bien l’opulence littéraire d’œuvres dont la fréquentation régulière change le cours d’une existence que ce qui, à l’instar d’un air de Mozart, est ressenti comme étant toujours déjà célèbre lors même qu’on le rencontre pour la première fois. En une époque d’excellence érogène qui patauge dans l’immense et dans l’inouï grâce à ses contemporains écrivants dont à chaque nouveau beaujolais les figures exorables ne craignent pas de venir pavoiser dans le paradigme, en l’ère de l’indiscernable et de la quantité qui fourmille sans jamais exulter, nous restituons la singularité : nous avons suspendu le monde de ceux qui croient qu’un auteur classique est un auteur classé, nous avons donné notre faveur à telle œuvre inépuisable et pourtant épuisée, à telle œuvre disparue ou détruite par des éditions fausses, nous soulignons l’incessante surprise que, classique, porte telle œuvre qui ne cesse de se montrer neuve et dont ne sépare que le préjugé mou ou la hâte en cravate. L’univers classique est d’une vastitude que l’on ne saurait circonscrire, non pas d’abord parce que les exégètes en parlent pendant des heures mais parce que son territoire demeure absurdement inconnu : en publiant tel livre dont, une fois ouvert, l’on se demande comment il a pu demeurer introuvable, cette collection a pour vocation de montrer à chacun combien il est simple, et combien préférable, de voyager longtemps sur la mappemonde étrangement inexplorée du génie. »
Maxence Caron