Service Littéraire, numéro 141
Bloc-Notes de Maxence Caron (octobre 2020) dans le Service Littéraire :
Le twittosophe est aux cabinets
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Cette page, adaptée pour les besoins de la presse, est extraite d’un texte considérablement plus vaste, que l’on trouve dans le Bloc-notes du mystique à l’état sauvage (Les Belles Lettres, 2024).
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Le twittosophe est aux cabinets
Un écrivain n’agit point à déplorer des calamités pour se donner quelque occasion de médire, mais à regarder quelque fait dont le seul récit laisse assez voir l’abomination – puis le symptôme, et le sens. Il y a là tout Balzac, Shakespeare et Saint-Simon.
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Oyez, oyez ! le twittosophe est aux cabinets (cf. R. Enthoven, Le temps gagné). Ne voir dans l’hémorragie psycho-affective d’Enthoven junior que la décompensation d’un refoulé quadridécennal qui fait papa dans sa culotte, serait médire par omission, car profondément réducteur. On oublierait de signaler certes le raffinement qui conduit l’élégance naturelle d’un si grand homme à décrire, tout pétri d’une empirique suavité, ses moments éblouis de villégiature aux latrines. Parmi tout ce qui sort de lui, il n’y a pas que ses phrases coites et sans style qui fascinent Enthoven fils. Entre les grégaires témoignages stercoraux de sa stagnation au stade sadique-anal, dont il ne sortira pas, et les cris que pousse son inexpugnable aigreur envers le phallus, auquel il n’atteindra jamais, la basse comptine ombilicale publiée par le journaliste nous rappelle ceci d’endémique et général : que celui qui se fait aujourd’hui appeler « philosophe » est toujours le spécimen d’une gent d’hommes lâche et bestiale, qui savent à peine distinguer par raison s’ils sont des bêtes ou des hommes. C’est toujours l’effet de l’erreur de se contredire soi-même : malgré les violentes sinusoïdes de son sadisme souriant, l’hystérie implore amour et reconnaissance. Aussi, de toute sa chie-en-lit l’auteur affectera de s’avouer prévenu lui-même, car il entend qu’on le lise avec de favorables préventions : il se sait un si bon gré de n’être que soi… Est-il grand celui qui suscite un instant l’alacrité des sots ! Si les hommes n’avaient l’esprit contrefait, ils n’iraient pas à tel qui aime qu’on l’aime et qui partout se montre, poursuivant pour qu’on le suive.
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Il fût vain d’attendre que nous citassions ce qu’en un siècle où tous les monstres croient avoir droit de se produire, ce malheureux ne s’est pas senti ridicule de répéter cent fois. Mes premières lignes ici ont dit le but : l’art poétique propre à l’observation pensante sait prononcer un propos impérissable sur des objets (sur des livres) qui ne le sont pas. L’art éthique et poétique de toute intervention littéraire est illimité. Et cette loi de la littérature se trouve dans la Bible : « Dieu dit : Fils d’homme, je fais de toi un veilleur pour Israël. Lorsque tu sauras ma parole, tu les avertiras. Si à celui qui choit tu ne dis pas que je le ferai mourir, si tu n’avertis pas cet homme mauvais ni ne lui dis d’abandonner sa conduite, lui, qui est mauvais, mourra de sa faute, et à toi je demanderai compte de son sang. » (Ezéchiel 33, 7)
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La France est un pays si rongé de passions sordides et d’ambitions infertiles qu’il est le seul où soit naturellement impossible que « la Presse » exerce le moindre contre-pouvoir. Les hommes politiques sont un bétail répugnant et lascif, mais les journalistes ne sont que des hommes politiques de race inférieure.
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L’athéisme n’est autre que le rêve que fait l’immoralité. L’être est, et c’est le plus petit dénominateur pensable, l’universelle précédence, ce dont dépend toute possible pensée, et la pensée même qui voudrait nier que l’être fût. Mais l’invincible regard de l’Universel est insupportable à la lâcheté des débauches : avec la même ténacité qu’elles mettent à l’entretien de leur périmètre de crampe hédoniste elles chassent l’œil de Dieu et voudraient s’en cacher. Mais l’être est et son regard perce la tombe où le petit-bourgeois planétaire règne et ribote. L’inexistence de Dieu n’existait pas, il lui a donc fallu l’inventer. L’athéisme est le rêve que fait l’immoralité. Elle est prête à tout pour lui car elle est prête à tout pour soi.
Maxence Caron