Le Mystère de Jésus
Blaise Pascal
Jésus souffre dans sa passion les tourments que lui font les hommes; mais dans l’agonie, il souffre les tourments qu’il se donne lui-même. Turbare semetipsum (Jn. XI, 25). C’est un supplice d’une main non-humaine, mais toute-puissante, et il faut être tout-puissant pour le soutenir.
Jésus cherche quelque consolation au moins dans ses trois plus chers amis et ils dorment ; il les prie de soutenir un peu avec lui, et ils le laissent avec une négligence entière, ayant si peu de compassion qu’elle ne pouvait seulement les empêcher de dormir un moment. Et Jésus était délaissé seul à la colère de Dieu.
Jésus est seul dans la terre non seulement qui ressente et partage sa peine, mais qui la sache. Le ciel et lui sont seuls dans cette connaissance.
Jésus est dans un jardin, non de délices comme le premier Adam, où il se perdit et tout le genre humain, mais dans un de supplices, où il s’est sauvé et tout le genre humain.
Il souffre cette peine et cet abandon dans l’horreur de la nuit.
Je crois que Jésus ne s’est jamais plaint que cette seule fois. Mais alors il se plaint comme s’il n’eût plus pu contenir sa douleur excessive. Mon âme est triste jusqu’à la mort.
Jésus cherche de la compagnie et du soulagement de la part des hommes.
Cela est unique en toute sa vie, ce me semble. Mais il n’en reçoit point, car ses disciples dorment.
Jésus sera en agonie jusqu’à la fin du monde : il ne faut pas dormir pendant ce temps-là.
Jésus au milieu de ce délaissement universel et de ses amis choisis pour veiller sur lui, les trouvant dormant, s’en fâche à cause du péril où ils exposent non lui mais eux-mêmes Continuer à lire « Pascal : « Le Mystère de Jésus » »
Voir : La page de l’émission sur le site de France Culture
Pierre Magnard et Raphaël Enthoven parlent de Pascal